BUICK RIVIERA (Ière génération) - L'empreinte de l'école italienne.
BUICK RIVIERA 1963

BUICK RIVIERA (Ière génération)- L’empreinte de l’école italienne.

Si la Ford Thunderbird, dont la première génération, présentée en 1954, a rapidement perdu la vocation « sportive » de cette dernière pour s’orienter, à partir de la seconde mouture, vers plus de luxe et de confort, c’est, avant tout, parce que cette évolution était une réponse à la demande de la clientèle visée par cette dernière. Celle-ci en apportera d’ailleurs la confirmation par les chiffres de vente qu’enregistrera la Thunderbird « number two » : plus de 198 000 exemplaires produits entre 1958 et 1960, soit près de quatre fois plus que sa devancière. Devant un tel plébiscite commercial, Ford décide, en toute logique, de persévérer dans cette voie, la Thunderbird devenant donc une sorte de « GT à l’américaine », plus à son aise sur les larges highways qui parcourent, de long en large, les différents Etats du territoire nord-américain que sur les routes sinueuses ou dans l’exercice du record de vitesse sur 400 mètres.

Or, comme il est alors de coutume au sein de l’industrie automobile américaine, où les trois grands groupes (General Motors, Ford et Chrysler) se livrent une concurrence féroce, le lancement d’un nouveau modèle à succès de la part de l’un amène très votre (généralement dans les deux ans, voire, parfois même, dans l’année qui suit) une réponse de la part des deux autres constructeurs. Si, à elle seule, la Ford Thunderbird de seconde génération, présentée en 1958, n’est sans doute pas à l’origine de la mise en chantier du modèle dont il est question, celui-ci, ainsi que plusieurs autres modèles du même genre, seront à l’origine de la création de la catégorie des « personnal cars ». Des voitures assez luxueuses à la ligne sportive (bien que, au vu de leur poids ainsi que de leurs dimensions, elles ne soient, « simplement », que des modèles de grand tourisme) qui, comme l’indique cette appellation, grâce à une liste d’options pléthorique, peuvent ainsi être personnalisées à volonté. Tant et si bien que, malgré une production de plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires par an, il n’y en a sans doute jamais (ou rarement) deux qui soient totalement identiques.

Comme Ford pouvait s’en douter, son éternel et principal concurrent, General Motors ne restera pas très longtemps les bras ballants, sans réagir. N’ayant toutefois, dans l’immédiat, aucune véritable « arme » qui soit suffisamment adaptée pour constituer une riposte efficace à « l’oiseau de feu » du groupe Ford (et contrairement à ce qui se passe d’ordinaire dans ce genre de cas), la direction et le bureau d’études de GM décident de prendre leur temps afin de créer un modèle « sur mesure » qui puissent rivaliser à coup sûr et le plus efficacement possible avec sa rivale et cible désignée. Le chef du bureau de style du groupe, William « Bill » Mitchell, qui vient de succéder, en 1958, à Harley J. Earl, de concevoir les lignes de la future « anti-Thunderbird ». Tout aussi talentueux mais ayant, néanmoins, des conceptions esthétiques souvent assez différentes de celles de son prédécesseur, ce dernier conçoit un coupé aux dimensions certes assez massives et imposantes, avec, une face avant agressive qui, vue de face comme de côté, n’est pas sans évoquer la proue d’un navire, mais, néanmoins, très sobre et élégante.

De profil, il n’y a guère que la double prise d’air finement chromée ainsi que la pliure de tôle (appelée aussi, dans le jargon employé par les designers, la « ligne de caractère »)courant sur toute la longueur de la voiture sur le haut des ailes et de la portière. Ainsi qu’une autre pliure de tôle, plus prononcée celle-ci, courant sur le bas de caisse de la voiture, depuis le passage de roue avant et sur l’aile arrière jusqu’au pare-chocs. En dehors de cela, le profil de ce nouveau coupé présente un aspect parfaitement lisse, sans aucune fioriture ou autre moulure chromée, bien dans le style des créations de Bill Mitchell ainsi que du nouveau courant esthétique des années 60.

Celui-ci marquant une rupture très nette avec les fioritures, les ailerons aux formes et proportions délirantes et les carrosseries au style aussi délirant qu’inutilement compliqué qui avaient marqué de nombreux modèles de la production américaine de la fin de la décennie précédente. Beaucoup de ceux-ci sont aujourd’hui considérés (aussi bien en Europe que sur leur terre natale) comme des modèles cultes (à juste titre d’ailleurs, tant ils ont marqué, en quelque sorte, l’apogée d’une sorte de « délire » en matière de style, comme on n’en verra, par la suite, plus jamais en sein de la production américaine). A leur époque, pourtant, ceux-ci firent l’objet de critiques parfois assez vives, non seulement de la part des observateurs de la presse automobile mais aussi d’une partie, assez importante, du public. Le problème, à l’époque, n’était pas que les Américains, de leur grande majorité, ne voulaient pas cesser de rouler dans d’imposants « paquebots sur quatre roues », loin de là. Mais ils souhaitaient, simplement, que ceux-ci présentent un style plus sobre et « consensuel », qui ne fasse plus ressembler leurs voitures à des véhicules tout droit sortis du cinéma ou des comics.

Si son prédécesseur Harley Earl était resté attaché, jusqu’à la fin de sa carrière, à ce que l’on pourrait véritablement qualifié de style « baroque », son bras droit et successeur, « Bill » Mitchell, lui, entend bien incarner une sorte de rupture, aussi bien parce qu’il a, très rapidement, saisi les nouvelles tendances du moment ainsi que la demande du public que par volonté (évidente et logique) d’imprimer durablement son empreinte sur le style des nouveaux modèles produits par General Motors. Un virage important (et parfois brutal) qui, s’il n’engendrera toutefois pas que des chefs d’oeuvres (il est, en effet, assez facile d’imaginer la difficulté à laquelle se sont retrouvés certains stylistes de passer, parfois sans véritable transition, « du baroque à l’art moderne »). Cependant, dans le cas de ce nouveau coupé, les lignes de cette dernière feront véritablement l’unanimité, tant auprès des hommes du bureau d’études et de la direction du groupe GM que de la clientèle visée ainsi que du public dans son ensemble.

Lorsque les grandes lignes en sont ainsi finalisées, en juin 1962, celui-ci reçoit la dénomination LaSalle XP-715, un nom emprunté à une division disparue de la GM, qui, entre 1927 et 1940, produisit des versions « low-cost » des modèles Cadillac. Après la suppression de celle-ci (faute de ventes jugées suffisantes), ce nom ne sera plus utilisé que sur des prototypes et autres concept-cars, dont celui du projet référencé sous le nom de code XP-715. S’il semble qu’à l’origine, Bill Mitchell ait eu l’idée d’une résurrection de la marque LaSalle, spécifiquement pour ce modèle, afin de mieux souligner sa singularité par rapport aux autres modèles de la GM, celle-ci sera toutefois rapidement abandonnée.

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BUICK RIVIERA 1963 (

La tâche à laquelle vont devoir s’atteler les responsables du service marketing de General Motors sera donc de lui trouver une marque sous le nom de laquelle elle sera commercialisée. Car il s’agit sans doute de l’un des rares points que Mitchell et ses stylistes, ainsi que le reste des hommes travaillant sur le projet XP-715, aient quelque peu négligés jusqu’ici. C’est alors que le directeur de la division Buick, après avoir découvert, avec les autres principaux cadres du groupe, le projet XP-715, une fois celui-ci finalisé, lors d’une présentation officielle en interne, insiste et fait même véritablement le siège des dirigeants de General Motors pour que le projet lui soit attribué. Si les arguments, voire même les pressions, émanant de ce dernier ne sont probablement pas, à elles seules, à l’origine du choix de l’état-major du groupe de commercialiser ce nouveau coupé sous le nom de Buick, il est clair, toutefois, que cela a, indéniablement, pesé dans la balance.

Si le responsable de la marque Buick a insisté pour que le projet soit attribué à Buick, ce n’est pas seulement parce que (comme les autres responsables des divisions de la GM, dont la plupart se déclarèrent d’ailleurs candidats pour accueillir au sein de leur gamme le projet XP-715). C’est aussi parce que, depuis 1957 et la récession économique qui a alors frappé le marché automobile américain (où les constructeurs ont vu les ventes de leurs modèles full-size chuter de 30 %), les chaînes de production des modèles Buick tournent en sous-capacité. Bien qu’au sein de l’organisation de la GM, ceux-ci se situent dans la partie supérieure de la pyramide et soient donc plutôt considérés comme des modèles de prestige, les Buick se situent néanmoins un cran en dessous des modèles Cadillac et se voient donc souvent éclipsés par ces derniers sur le marché des voitures de haut de gamme. C’est pourquoi le projet de ce coupé d’un nouveau genre permettrait ainsi de remettre Buick sur le devant de la scène en lui offrant un modèle n’ayant pas de véritable équivalent au sein de la gamme Cadillac comme des autres divisions de la GM.

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BUICK RIVIERA 1963 (

Reste à lui trouver une appellation en adéquation, aussi bien, avec son statut élitiste qu’avec sa vocation grand tourisme. Est-ce parce que celui-ci avait pour mission de rivaliser sur le marché américain avec des GT européennes aussi prestigieuses que les coupés Mercedes, Jaguar, Alfa, Lancia ou même Maserati ? Ou (justement) parce que Bill Mitchell n’a jamais caché son admiration pour ces dernières et qu’il voulait prouver que General Motors (et l’industrie automobile américaine en général) était capable de créer un coupé de prestige qui n’est rien à leur envier, tant en termes de réussite technique ou esthétique ? Sans doute les deux. En tout cas, lorsque l’on évoque l’Europe et, surtout, les voyages en voiture à travers l’Europe, l’une des images qui viennent immanquablement à l’esprit de la plupart des Américains est la Riviera italienne, évoquant la longue route parcourant, sur plusieurs milliers de kilomètres, les rivages de la côte italienne. Le nom est ainsi tout trouvé et c’est ainsi que, des deux côtés de l’Atlantique, le public à l’occasion de découvrir et de contempler la nouvelle Buick Riviera à l’automne 1962.

Les espérances du directeur général de Buick ainsi que celle de Bill Mitchell sont amplement comblées, probablement même au-delà de ce qu’ils escomptaient au départ, puisque les 40 000 exemplaires annoncés seront rapidement vendus bien avant la fin officielle du millésime. Ce nouveau coupé de grand tourisme recevra d’ailleurs des louanges qui iront bien au-delà du monde de la presse automobile mais également par de nombreux grands noms du monde de l’automobile de l’époque. Ainsi, Raymond Loewy (à qui l’ont doit les modèles les plus emblématiques de la marque Studebaker depuis la fin des années 30 jusqu’à la disparition de la firme au milieu des années 60), qui, pourtant, a souvent vivement critiqué le style des voitures américaines contemporaines, trop « tapageur » et « extravagant » à son goût, saluera le style de la Riviera pour sa sobriété, estimant même qu’il s’agissait de la seule voiture américaine en mesure de rivaliser, sur le plan de l’esthétique, avec la Studebaker Avanti (présentée en 1963, peu de temps après le coupé Buick). William Lyons, le président-fondateur du constructeur britannique Jagua, lui aussi, félicitera publiquement Bill Mitchell et ses stylistes pour la création de la Riviera. Quant à Sergio Pininfarina (qui est – faut-il le rappeler ? – le styliste attitré de Ferrari), il exprimera publiquement son regret que le dessin du coupé Buick ne soit pas sorti de ses ateliers.

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BUICK RIVIERA 1963

Afin de renforcer son caractère élitiste, le constructeur a, en effet, annoncé que la production de la nouvelle Riviera pour l’année-modèle 1963 serait limitée à quarante mille exemplaires, pas un de plus. Une idée imaginée par Roland Whiters, en charge de la promotion marketing du nouveau coupé de la marque Buick et qui s’avérera payante. En regard (ou même, indépendamment) de cette production assez limitée (tout au moins, à l’échelle des cadences auxquelles sont habituées les constructeurs américains), la Buick Riviera peut être considérée comme un succès commercial si l’on prend en compte son prix de vente qui n’est pas vraiment donné : 4 333 dollars hors options (soit presque trois fois et demie celui d’une Chevrolet Chevy II Nova de base, l’un des modèles les moins chers produits à l’époque par General Motors).

Ainsi que le souhaitait Bill Mitchell, la Riviera, à l’instar d’une Jaguar ou d’une Bentley au sein de l’industrie automobile britannique, la Buick Riviera alliant, de manière aussi parfaite que brillante, les performances au confort. Afin, justement, de renforcer ce caractère sportif, en plus de la version standard, laquelle affichait pourtant déjà des performances très « respectables » avec son V8 de 6,5 litres développant 325 ch, une seconde version encore plus performante avec une puissance de 340 chevaux. Si, avec la fin du premier millésime de production de la Riviera et la disparition de « l’effet nouveauté », comme cela arrive très souvent pour la plupart des modèles (aussi bien populaires que prestigieux) la production baissera sensiblement lors du millésime suivant, il s’en écoulera tout de même près de 38 000 exemplaires durant l’année-modèle 1964, preuve que le style du coupé Riviera ainsi que la catégorie dans laquelle elle s’inscrivait (celle des personnal cars) n’était pas qu’une simple mode éphémère mais était bien destinée à s’insérer durablement sur le marché américain.

BUICK RIVIERA (Ière génération) - L'empreinte de l'école italienne.
BUICK RIVIERA 1964

Comme il est souvent de règle avec les nouveaux modèles, ce second millésime de production n’offre guère d’évolutions marquantes, le modèle se contentant, simplement, de « poursuivre sur sa lancée ». Les évolutions demeurant donc mineures et se limitant à des détails dans la présentation intérieure et extérieure, avec pour résultat qu’il faut presque une loupe et s’amuser à jouer au « jeu des sept erreurs » afin de parvenir à distinguer une Riviera de l’année-modèle 1964 de celle du premier millésime, celui de 1963. A la fois parce que, comme le dit un vieux dicton bien connu « on ne change pas une recette qui marche » mais aussi parce qu’il est alors (et depuis l’avant-guerre déjà) dans l’habitude des constructeurs américains de changer entièrement la ligne de leurs modèles, en moyenne, tous les trois ans. Les voitures des millésimes dits « intermédiaires » ne présentant donc que des changements cosmétiques mineurs, se limitant, le plus souvent, au dessin de la calandre, des jantes ou des enjoliveurs de roues, des pare-chocs et des moulures chromées, ainsi que de l’agencement du tableau de bord et de l’aspect des selleries.

C’est à l’occasion de la présentation des modèles de la gamme Buick du millésime 1965 que la première génération de la Riviera connaîtra sa seule modification esthétique d’importance, succombant alors à une nouvelle mode sur les voitures de grand tourisme et sportives : celle des phares escamotables. En réalité, ceux-ci avaient déjà été envisagés pour la Riviera à l’époque de la conception de celle-ci, mais les techniciens de General Motors n’étaient alors pas parvenus à mettre au point un système entièrement fiable, avec pour conséquence que le modèle de série présenté fin 1962 dût alors se contenter de phares classiques. Ce n’est que deux ans plus tard, à l’automne 1964, que ces derniers réussirent à mettre au point le système en question.

BUICK RIVIERA (Ière génération) - L'empreinte de l'école italienne.
BUICK RIVIERA 1965

La Riviera du millésime 65 présente donc une face avant entièrement « aveugle », les doubles optiques circulaires étant, à présent, dissimulées derrière des grilles factices qui prolongeaient celles de la calandre. Les évolutions esthétiques ne se limitant d’ailleurs pas au dessin de la proue mais touchant aussi la partie arrière. Placés auparavant, de manière tout à fait classique, dans le panneau de tôle entre la malle de coffre et le pare-chocs arrière, les feux, plus grands et allongés que précédemment, se trouvent désormais intégrés à celui-ci. De profil, la voiture demeure toutefois identique ou presque aux modèles des deux millésimes précédents, la seule différence permettant de reconnaître, vue sous cet angle, une Riviera de l’année-modèle 1965 étant des flancs désormais entièrement « lisses », les prises d’air factices placées auparavant entre la portière et le passage de roues arrière. Sous le capot aussi, l’évolution est assez significative, avec une puissance atteignant, à présent, sur la nouvelle version Gran Sport, désormais la plus performante à être proposée sur la Riviera, pas moins de 360 chevaux grâce au à une alimentation confiée désormais à deux carburateurs quadruple corps. Extérieurement, la Riviera Gran Sport se reconnaît à ses deux lignes d’échappement optimisées, des jantes en acier chromé à cinq branches ainsi que leur emblème spécifique placé sur les ailes avant.

BUICK RIVIERA (Ière génération) - L'empreinte de l'école italienne.
BUICK RIVIERA 1978

Si l’accueil du public comme de la presse automobile ainsi que les ventes de la Riviera se montrent parfaitement à la hauteur des attentes de Bill Mitchell et des dirigeants de General Motors, le nouveau coupé Buick échouera (tout du moins, en partie) sur l’un des points de la mission qui lui avait été confiée : à savoir, détrôner la Ford Thunderbird. Dans le monde de l’automobile comme dans beaucoup d’autres domaines, le premier arrivé sur un nouveau marché récolte toujours (ou, en tout cas, souvent) la plus grosse part du gâteau, les autres, aussi réussis que soient les modèles ou les produits proposés par ceux-ci, devant se « contenter », en quelque sorte, de se partager le « reste » du gâteau en question. Ainsi, malgré toutes ses qualités, les chiffres de vente de la Buick Riviera resteront toujours inférieurs à celui de sa principale rivale, la Thunderbird : ainsi, alors que 40 000 exemplaires de la Riviera avaient été produits lors du millésime 1963, Ford parviendra, de son côté, à écouler plus de 63 300 unités de la « T-Bird » (pourtant facturée sensiblement plus chère que la Buick, puisqu’elle est vendue entre 4 445 et 4 912 dollars suivant les versions).

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S’il convient de rappeler que la production de la Riviera pour son premier millésime avait été volontairement limitée afin de renforcer le caractère « exclusif » de ce modèle, bien que n’étant plus limitée pour les millésimes suivants, celle-ci ne parviendra jamais à dépasser ce seuil. Ford se frottant d’ailleurs les mains, car les ventes de « l’oiseau de feu » (qui en est alors à sa quatrième génération) se maintiendront toujours à un très bon niveau, atteignant même un « pic » en 1964, avec près de 92 500 exemplaires sortis d’usine. Si, par la suite et jusqu’à la fin des années soixante, les ventes de la Thunderbird n’atteindront plus jamais un tel niveau, au sein du marché des « personal cars », elle continuera toujours à figurer dans le peloton de tête. Ceci, en dépit d’une concurrence qui continue à se développer et, même, à devenir de plus en plus féroce. Du fait qu’elle s’adresse à une clientèle assez aisée (la marque Buick ayant une image beaucoup plus luxueuse que celle de Ford, lequel demeure, avant tout, un constructeur « généraliste » plutôt spécialisé dans les modèles populaires), la Riviera n’a jamais été créée afin de battre des records de vente.

Toutefois, la direction de General Motors a toujours bien la ferme intention de parvenir à damner le pion à son éternel rival à l’ovale bleu, celle-ci alors de revoir profondément la Riviera pour le millésime 1966 avec une nouvelle génération. Les lignes de celle-ci étant, manifestement, inspiré d’un autre coupé produit par GM et dévoilé à la même époque, l’Oldsmobile Toronado (qui a, notamment, pour particularité d’être équipé de la transmission aux roues avant, ce qui est alors une première depuis près de trente ans pour un modèle de série au sein de la production américaine). Si, comme cette dernière, la Riviera de seconde génération arborera alors une silhouette beaucoup plus singulière que celle de sa devancière, n’étant pas sans évoquer une sorte de « sous-marin » ou de « créature marine » ou encore un « engin spatial » que l’on pourrait presque croire sortie des séries Star Trek ou Cosmos 1999. En outre, cette nouvelle mouture sera également sensiblement plus longue (5,36 mètres contre 5,28 m pour sa devancière), plus large (atteignant ainsi la barre des deux mètres de largeur contre 1,93 m précédemment) et (assez logiquement) plus sensiblement plus lourde (un peu plus de 90 kg supplémentaires sur la balance).

BUICK RIVIERA (Ière génération) - L'empreinte de l'école italienne.
BUICK RIVIERA 1989 – 93

Si cette seconde mouture connaîtra un succès commercial sensiblement meilleur que celui de sa devancière, atteignant ainsi plus de 52 800 exemplaires produits pour l’année-modèle 1969 et près de 227 700 unités, contre un peu plus de 112 200 pour la première génération, son esthétique ne fera toutefois jamais vraiment l’unanimité, contrairement à celle de sa devancière. Il faudra attendre la présentation de la nouvelle et troisième génération, fin 1970, laquelle abandonne la silhouette classique du coupé tricorps en faveur d’une ligne de type fastback désormais plus à la mode sur les coupés de grand tourisme ou sportifs et se caractérisant également par, non seulement, par une proue dont le museau évoquant fortement, là aussi, la proue d’un navire fait référence, de manière à peine voilée, à la Riviera première du nom mais aussi le pavillon se terminant en forme de pointe à l’arrière, évoquant, tout à la fois, la poupe des coupés Corvette C2 des années soixante ainsi que la coque d’un navire renversée ainsi, sous certains angles, un avion de chasse. Une réussite esthétique due aussi, probablement, à ses proportions assez imposantes, la Riviera (comme d’ailleurs ses consoeurs, tant au sein des autres divisions de General Motors que de la concurrence) atteignant ainsi une longueur de 5,67 mètres pour la version du millésime 73.

BUICK RIVIERA (Ière génération) - L'empreinte de l'école italienne.
BUICK RIVIERA 1995

Avec la première génération, cette Riviera « number three » sera d’ailleurs considérée comme la plus réussie par un grand nombre d’amateurs du modèle ainsi des fans d’américaines en général. Une génération qui ne durera malheureusement que le temps de trois millésimes, ce que beaucoup de clients de la marque ainsi que de voitures de grand tourisme ne manqueront pas de regretter lorsque celui-ci quittera la scène. Une carrière sans doute écourtée par les bouleversements que traverse alors l’industrie automobile américaine (avec la flambée des prix de l’essence ainsi que des tarifs d’assurance). Si les muscle cars seront les principales victimes de cette tempête qui va bientôt souffler sur Detroit et ses constructeurs, celle-ci touchera tous les modèles full-size. Lesquels, après n’avoir cessé de grossir, que ce soit en ce qui concerne la taille de leurs carrosseries ainsi que celles de leurs moteurs, vont désormais devoir se mettre à la diète. Un régime souvent assez sévère qui fera perdre à beaucoup d’entre-eux une grande partie de leur superbe.

La Riviera devenant, dès lors, un simple coupé certes toujours assez élégant et cossu mais manquant néanmoins fortement de personnalité et ne se différenciant donc guère de ceux proposés par Cadillac ainsi que par ses rivaux directs Mercury et Chrysler. Il faudra attendre la présentation de la huitième génération, en 1995, pour que la Buick Riviera retrouve une véritable personnalité. Une personnalité qui, sur le plan esthétique, sera toutefois plus proche de celle des coupés de prestige européens et japonais que des premières générations de la grande époque. L’histoire des générations successives de la Riviera incarnant ainsi (même si ce sera aussi le cas d’un grand nombre de modèles, autrefois emblématiques) l’évolution de l’industrie automobile américaine, que l’on pourrait résumer par la célèbre formule « grandeur et décadence ».

Maxime DUBREUIL

Photos Wheelsage

D’autres voitures US https://www.retropassionautomobiles.fr/2022/10/dodge-monaco/

En vidéo https://youtu.be/fWdURy21UL4

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