INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI MINI DE TOMASO

INNOCENTI MINI « BERTONE »- Sauces Worcestershire et bolognaise.

Bien que son nom soit typiquement italien, l’histoire de l’aventure automobile de la firme Innocenti ne trouve pas ses origines au pays de Dante mais dans celui de Shakespeare. Plus précisément en 1959, lorsque Ferdinando Innocenti, fondateur de l’entreprise qui porte son nom, signe un accord de  partenariat avec BMC (British Motor Corporation, qui est alors le deuxième plus grand constructeur automobile britannique derrière la filiale anglaise de Ford).

Spécialisée, lors de sa création, en 1930, dans la métallurgie (notamment la fabrication de tubes métalliques et d’échafaudages), celle-ci décide, après la Seconde Guerre mondiale, de se diversifier dans la production des deux-roues. Plus précisément des scooters, qui deviennent le nouveau moyen de locomotion individuel préféré des classes populaires (dont beaucoup, dans la situation économique sinistrée des premières années de l’après-guerre, ne peuvent encore s’offrir une voiture neuve). La firme Innocenti va même en devenir, avec Piaggio, l’un des plus importants constructeurs de scooters, non seulement en Italie mais aussi en Europe. Ceux-ci seront baptisés du nom de Lambretta, en référence au quartier de Lambrate, à Milan, où se trouve le siège ainsi que l’usine Innocenti.

Dans la seconde moitié des années 50, si ceux-ci restent toujours très populaires, l’amélioration de la situation économique italienne et l’élévation sensible du niveau de vie permettent à de plus en plus d’Italien(ne)s de pouvoir commencer à envisager de s’offrir leur première voiture. Fiat, le premier constructeur automobile du pays, l’a d’ailleurs bien compris et les sympathiques 600 puis 500 qui sortent en grand nombre des chaînes d’assemblage de son usine de Turin vont largement contribuer à cette démocratisation de l’automobile au sein de la péninsule italienne. De son côté, Fernandino Innocenti ne peut, évidemment, rester insensible et donc très longtemps les bras croisés face à ce bouleversement du paysage des routes italiennes.

Plutôt que de faire concevoir et produire en grande série un (ou des) modèle(s) inédits (ses moyens, malgré les bénéfices que lui ont rapporté la production des scooters, ne lui permettant sans doute guère de rivaliser avec ceux du géant turinois), il décide alors de recourir à une « solution de facilité » (qui est aujourd’hui et depuis longtemps devenue courante au sein de l’industrie automobile mais qui était encore loin de l’être à la fin des années 1950) en produisant, tout simplement, au sein de son usine milanaise des modèles déjà existants. Ceci, en se contentant de leur offrir un léger lifting (extérieur et/ou intérieur) afin de les adapter aux goûts de la clientèle italienne.

Si les premières automobiles Innocenti, qui commence à y être produites à la fin de l’année 1960 sont des berlines Austin A40 (rebadgées, bien évidemment, du nom d’Innocenti), un nouveau modèle fait son apparition l’année même de la signature de l’accord de coopération entre le constructeur de scooters italien et le géant automobile britannique. Plus encore que ses devancières, celle-ci va rapidement et largement contribuer à remettre l’Angleterre sur roues. D’abord baptisée Seven Mini, en hommage à sa glorieuse devancière, l’Austin Seven, apparue dans les années 1920 et qui fut la première vraie voiture anglaise populaire, elle sera très vite, tout simplement, renommée Mini « tout court ».

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INNOCENTI A40

Si les versions les plus produites et les plus connues (surtout hors du Royaume-Uni) furent celles produites sous les noms d’Austin et Morris, elle aura aussi bientôt droit à des versions plus luxueuses et parfois même assez « kitches » commercialisées sous les marques Riley et Wolseley. Même si ce n’est toutefois qu’à partir de l’automne 1965 que les premières Mini « made in Italy » commenceront à être assemblées sur les chaînes de l’usine de Lambrate. En dehors d’un dessin de calandre différent ainsi que de la cosmétique comme le dessin des jantes, des pare-chocs ainsi que des baguettes chromées ou de détails de présentation et de décoration de l’habitacle, ces dernières restent toutefois identiques ou presque à leurs cousines anglaises.

Tout cela va cependant changer au début des années 70. A la fin du printemps 1972, plus exactement, lorsque le groupe automobile britannique, rebaptisé British Leyland Motor Corporation, absorbe le constructeur italien. Nommé par Donald Stokes, le PDG de BLMC, à la tête d’Innocenti, Geoffrey Robinson, juge alors, probablement, que les lignes rondouillardes de la Mini sont désormais quelque peu passées de mode (le style « cunéiforme » faisant alors son apparition en Europe) et souhaite sans doute également conférer à la Mini italienne une personnalité propre. Il commande alors au carrossier Bertone, connu pour le brio du coup de crayon de ses designers ainsi que ses capacités à pouvoir produire en petite comme en grande série des modèles en tous genres (populaires ou prestigieux) pour les constructeurs de toutes nationalités. l’étude d’une nouvelle carrosserie plus « dans l’air du temps ».

Dirigé alors par le célèbre designer Marcello Gandini (auteur des Lamborghini Miura et Countach, entre autres célèbres créations sur quatre roues), ce dernier et son équipe vont livrer une réinterprétation aussi moderne que « radicale » de la petite puce créée par Alec Issigonis. Radicale dans le sens où, en plus de ne conserver aucun panneau de carrosserie ni autre élément d’accastillage en commun avec sa glorieuse aînée, sa silhouette marque une rupture radicale avec cette dernière. Laquelle, malgré un charme toujours indéniable ainsi qu’un grand nombre d’aficionados qui lui restent toujours fidèles (aussi bien au Royaume-Uni qu’à l’étranger), prend, instantanément, un certain « coup de vieux ».

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Consciente, ou, en tout cas, persuadés que le style de la Mini originelle (tout comme celui de ses devancières ou concurrentes) finirait, tôt ou tard, par se démoder et donc que la clientèle commencerait alors à s’en détourner. C’est pourquoi, dès 1968 (alors qu’elle n’avait pas encore dix ans), de nombreux projets de modernisation de la Mini furent étudiés par le bureau d’études de British Leyland, mais aucun d’entre-eux ne recevra jamais l’aval de la direction du groupe pour être commercialisé et venir ainsi la remplacer.

Il est vrai que le constructeur va bientôt avoir d’autres priorités et, surtout, d’autres soucis que de moderniser ou de remplacer la Mini. Son principal objectif étant, bientôt, rien de moins qu’assurer sa survie ! Plombé par un trop grand nombre de filiales, des gammes souvent trop pléthoriques et parfois même incohérentes, une qualité de fabrication en chute libre, des grèves à répétition et autres problèmes du même genre, British Leyland fait bientôt figure de véritable Titanic non seulement de l’industrie automobile britannique mais aussi européenne.

En attendant, comme pour le Titanic, que le navire British Leyland, depuis un certain temps déjà à la dérive, ne « heurte l’iceberg », la « Nuova Mini » s’apprête donc à entrer en scène. Sous la forme de deux versions, 90 et 120 (en référence à la cylindrée de leur mécanique, 998 cc et 49 ch pour la première et 1 275 cc et 65 chevaux pour la seconde) se distingue de la puce produite en Angleterre sous les noms d’Austin et Morris, outre sa silhouette cunéiforme par ses roues de 12 pouces et ses freins à disque à l’avant (deux caractéristiques dont la Mini anglaise ne bénéficiera qu’en 1984, le radiateur frontal équipé d’un ventilateur débrayable, quant à lui, ne se retrouvera sur celle désormais vendue sous le nom de Rover Mini qu’en 1996!).

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INNOCENTI MINI 90

Si cela n’empêche pas la nouvelle Innocenti Mini d’être dévoilée au public à l’occasion du Salon de Turin, en novembre 1974, sa « première carrière », sous le label du groupe British Leyland, sera toutefois fort courte puisqu’elle durera à peine plus d’un an. Se retrouvant très vite au bord du gouffre, le gouvernement britannique de l’époque (dirigé par les Travaillistes) ne voit alors d’autre solution que de décréter sa nationalisation pour lui éviter un naufrage pur et simple. Si celle-ci sauve (en tout cas en partie et provisoirement) celui-ci (ainsi que ses milliers de salariés) de la faillite, la première mesure prise afin de tenter d’en assainir les finances exsangues et de « colmater les brèches » pour éviter que le navire coule est de couper, sans guère d’états d’âme, toutes les branches « malades » de l’arbre. Ainsi que toutes celles que les représentants du gouvernement de Londres jugent inutiles ou insuffisamment rentable. Une sorte de « grand nettoyage par le vide » va alors progressivement s’opérer au sein du groupe automobile nouvellement nationalisé, tant au Royaume-Uni qu’à l’étranger. De l’autre côté de la Manche, cela conduira à la disparition de Wolseley en 1976, de Morris sept ans plus tard et de Triumph l’année suivante ainsi que de la vente d’Innocenti en Italie, cette même année 1976.

Celui qui se portera acquéreur du constructeur des Mini italiennes n’est d’ailleurs pas un inconnu au sein de l’industrie automobile italienne, puisqu’il s’agit d’Alejandro De Tomaso. Outre la marque de voitures de sport portant son nom (connue surtout pour la mythique Panthera), ce dernier s’est bâti, à la même époque, un véritable petit empire (en grande partie, il est vrai, grâce aux aides financières et autres facilités accordées à l’époque par le gouvernement italien pour la reprises d’entreprises en difficultés). Outre Innocenti, il ajoutera ainsi Maserati (jusqu’alors propriété de Citroën et revendue après le rachat de la marque aux chevrons par Peugeot) ainsi que les motos Guzzi à son portefeuille.

Si, jusqu’ici, la production des anciennes versions de la Mini, les 1001 et Cooper 1300 (qui conservaient donc la carrosserie de la Mini originelle) s’était poursuivie en dépit du lancement des nouveaux modèles à carrosserie Bertone, l’une des premières décisions prises par De Tomaso est de recentrer la production sur ces dernières. Ceci, sans doute, afin d’offrir ainsi à la marque une « véritable » identité italienne (et qu’Innocenti n’apparaisse plus ainsi comme un simple « sous-traitant » pour la production des Mini vendues en Italie) comme de tourner la page de l’ère British Leyland. Une page qui, toutefois, ne sera pas entièrement tournée dans l’immédiat, car, bien que n’étant désormais plus une filiale du groupe britannique, ce dernier, suite à un accord passé avec De Tomaso, accepte de continuer à fournir à Innocenti les mécaniques de la Mini, qui continuent donc à équiper également sa cousine italienne.

Sans doute, à la fois, afin de remplacer la Cooper (qui a maintenant disparu du catalogue) et aussi, probablement, afin de profiter de la nouvelle vague naissante des GTI (la Golf GTI étant présentée au même moment) qu’est présentée une nouvelle version sportive, baptisée « tout simplement » De Tomaso et dont le moteur que l’on retrouve sous son capot n’est autre que celui de la Cooper. Extérieurement, elle se reconnaît, au premier coup d’oeil, à ces pare-chocs plus massifs ainsi que des bas de caisse et extensions d’ailes en plastique gris foncé, ses antibrouillards, ses jantes en aluminium, sa double sortie d’échappement, une prise d’air (qui n’est toutefois, malheureusement, que factice) sur son capot. Intérieurement, les différences sont moins nombreuses, même si la Mini De Tomaso se distingue toutefois des versions « standard » par son tableau à l’instrumentation plus complète ainsi que le montage d’un volant ajouré, qui sont d’ailleurs les seules vraies notes sportives de l’habitacle.

INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI MINI DE TOMASO

De sportive, la version De Tomaso en a peut-être le look mais pas (encore) véritablement les performances, puisque la mécanique qui l’anime (le bloc type « A », bien connue de tous les propriétaires d’Austin, puisque, outre la Mini, il a également équipé quasiment tous les modèles populaires de la marque depuis sa création… dans les années 50!) n’a pas grand-chose d’un foudre de guerre, puisqu’il ne développe, en tout, que 71 modestes chevaux. Bien que dévoilée au Salon de Turin en novembre 1977, la clientèle française devra encore patienter durant près d’un an avant de pouvoir en acquérir une, puisqu’elle ne sera disponible chez nous qu’à partir d’octobre 78.

A signaler également que, bien que revendue à l’industriel italo-argentin, étant donné qu’Innocenti ne dispose pas de son propre réseau de vente en France, les Innocenti Mini « Bertone » continuent à y être diffusées par celui de British Leyland. A l’autre extrémité de la gamme apparaît également, en 79, une version « Commerciale » se distinguant des autres versions de la gamme par l’absence de banquette à l’arrière, lui permettant ainsi de bénéficier d’une TVA réduite.

L’année 1979 sera d’ailleurs celle où l’Innocenti Mini atteindra son plus haut score de vente sur le marché français, avec pas moins près de 4 300 exemplaires qui y seront vendus. Même s’il est vrai que cela ne représente qu’un peu plus du dixième de la production totale du modèle, puisque ce seront, au total, environ 40 000 Mini italiennes qui, à la même époque sortent alors de l’usine de Lambrate (la production du modèle atteignant son point culminant en 1978, après un peu plus de 40 700 Innocenti Mini produites, toutes versions confondues). Par rapport aux modèles des millésimes précédents, les voitures de l’année-modèle 79 ne présentent toutefois que des évolutions minimes, principalement dans le dessin des jantes ainsi que de la sellerie (celle-ci variant, plus ou moins fortement, suivant les versions).

INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI MINI MILLE

Alors que le Salon automobile de Turin se déroule habituellement à l’automne, il sera avancé, pour l’année 1980, au printemps. A cette occasion, le constructeur dévoile une nouvelle version haut de gamme, la Mille, reconnaissable à sa calandre ainsi que ses phares désormais inclinés du haut vers le bas (ce qui allonge ainsi le porte-à-faux avant de la voiture de 5 cm supplémentaires), ses boucliers ainsi que ses protections latérales en plastique brun, le bandeau rouge avec le nom « Innocenti » entre les feux arrière, les grilles d’air agrandies sur les montants arrière, de nouvelles jantes au dessin inédit, une nouvelle planche de bord (avec des compteurs que n’aurait pas renié Citroën, tant leur graphisme évoque assez fortement celle des premières GS et CX). Etant donné sa vocation, la Mille (en particulier celle vendue en France) présente une dotation de série assez cossue avec des glaces électriques, une montre digitale, une boîte à gants fermant à clé, etc).

INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI MINI MILLE

A la même époque (fin des années 70, début des années 80), plusieurs séries spéciales font également leur apparition, plusieurs d’entre-elles étant disponibles dans tous les pays où la marque est présente, tandis que d’autres sont réservées aux marchés français ou italien. Certaines ne se distinguant toutefois des versions « standard » proposées en permanence au catalogue que par une teinte de carrosserie et/ou une sellerie spécifique ou encore le dessin de leurs jantes. Il en sera ainsi de la De Tomaso Amaranto (se distinguant par sa carrosserie peinte de couleur bordeaux et ses jantes spéciales) ainsi que de la Black (dont le nom indique, évidemment, sa couleur extérieure mais dont il s’agit cependant de la seule vraie spécificité).

Les évolutions suivantes arriveront en 1982, toujours à l’occasion du Salon de Turin. Cette fois, les évolutions ne sont plus seulement esthétiques mais, avant tout et surtout, techniques et elles sont d’importance, puisque, à cette occasion, l’Innocenti Mini abandonne le quatre cylindres en ligne héritée de sa cousine anglaise. La mise en production par British Leyland de la nouvelle Austin Metro (qui sera d’ailleurs baptisée, à son lancement, Mini Metro, ce qui reflète bien que sa vocation originelle était de remplacer la Mini « classique », même si ce sera, au final, cette dernière qui finira par enterrer sa descendante) conduisant alors le groupe britannique a décidé, à l’automne 1981, de cesser ses fournitures de moteurs à Innocenti et à De Tomaso. Ce dernier n’avait cependant pas attendu la fin du contrat avec les Anglais pour se chercher un nouveau fournisseur pour les moteurs destinés aux Innocenti. C’est toutefois à l’autre bout du monde qu’il va trouver le fournisseur en question, au pays du Soleil Levant, plus précisément chez le constructeur Daihatsu.

Alejandro De Tomaso signant, en effet, en juillet 81, un accord avec celui-ci, qui verra ainsi les « Nuova Mini » italiennes recevoir sous leur capot le trois cylindres équipant les citadines nippones. Si, avec sa cylindrée de 993 cc et sa puissance de 52 chevaux, celui-ci n’a, évidemment, rien (pour l’instant, tout du moins) d’une mécanique sportive, des versions plus performantes ne tarderont guère à voir le jour. Outre le fait qu’il s’agit des premières voitures équipées d’un moteur trois cylindres à quatre temps vendues sur le marché français (d’autres constructeurs européens avaient déjà utilisés auparavant cette architecture, mais leurs moteurs conservaient toutefois le cycle à deux temps), le moteur Daihatsu apporte également une modernité technique bienvenue aux Innocenti Mini. Sans compter que la souplesse d’utilisation et la vivacité du 3 cylindres « made in Japan » sont sans commune mesure avec celles du vieux bloc Austin qui équipaient jusqu’ici les Innocenti (et qui, du fait de l’état encore « convalescent » des finances de British Leyland, outre la Mini anglaise, jouera aussi les prolongations sous le capot de la Metro).

Autre avantage important par rapport à ses anciennes cousines britanniques, le moteur Daihatsu se voit aussi accouplé à une boîte à cinq vitesses (alors que la Mini et la Metro doivent encore, à la même époque, se contenter de quatre vitesses). Plus compacte et plus légère, cette nouvelle mécanique permet aussi, « accessoirement », aux petites citadines italiennes de perdre une cinquantaine de kilos dans l’opération. Les changements techniques ne concernent d’ailleurs pas que le moteur et la boîte de vitesses, puisque les nouvelles « Mini Italia » bénéficient également de nouveaux trains roulants (type McPherson simple à l’avant ainsi que des triangles transversaux secondés par un ressort à lame unique à l’arrière).

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INNOCENTI MINI 90 SL

Rebaptisée Mini 3 (ou « Minitre » en italien), cette nouvelle série arrive en France à la fin de l’année 82 (les voitures étant donc vendues comme des modèles du millésime 83). C’est aussi à cette époque qu’Innocenti change d’importateur en France, les Mini étant désormais vendues par la société France Motors (le fait qu’elles soient à présent motorisées par des moteurs japonais n’est sans doute qu’une simple coïncidence, même celle-ci assure alors également la diffusion dans l’hexagone des Mazda). Si les différentes versions de la Mini Innocenti continuent à afficher des chiffres de ventes assez honorables en France, avec près de 2 200 voitures qui y seront écoulées durant l’année 1983, ceux-ci demeurent, néanmoins, quelque peu trop faibles aux yeux de l’importateur. Surtout que certaines de ces rivales la dépassent assez largement sur le marché français, telle l’Autobianchi A112 (pourtant plus ancienne, puisqu’elle est apparue sur le marché en 1969), laquelle dépasse alors les 8 000 exemplaires vendus chaque année chez nous.

L’importateur français décide alors d’offrir un léger lifting aux Innocenti Mini vendues en France, celles-ci, des pare-chocs peints de la couleur de la carrosserie (à l’exception de la version SE, laquelle conserve des protections en plastique noir), une nouvelle boîte de vitesses équipée d’une commande ainsi que d’un étagement modifié, ainsi que de nouvelles plaquettes de freins et, dans l’habitacle, une nouvelle sellerie sur les sièges, la banquette et les contre-portes. Après ces nouvelles versions, présentées au milieu de l’année 1984, quelques mois plus tard, à l’occasion du Salon de Paris, en octobre suivant, sont dévoilées plusieurs autres nouveautés marquantes.

La première, la « Minimatic » se présentant sous la forme d’une version à transmission automatique (elle aussi d’origine Daihatsu), qui ne comporte toutefois que… deux rapports (alors que, même si elles sont très souvent d’une échelle bien supérieure, la majorité des modèles de la production américaine, comportent, eux, quatre vitesses). La seconde, la « Minidiesel » (nom authentique, comme pour la précédente!) étant, de son côté et comme son nom l’indique, dotée d’un moteur fonctionnant au gazole (avec une cylindrée d’à peine 1 litre, pour une puissance de 37 ch, il s’agit alors du plus petit Diesel disponible alors sur le marché français). Celle qui sera toutefois, à bien des égards, la version la plus marquante de la carrière des Mini Innocenti ainsi que l’une de ses versions les plus désirables est, indéniablement, la nouvelle De Tomaso Turbo.

INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI MINI DE TOMASO

Présentée au début de l’année 1984, lors du Salon de l’auto de Bruxelles, cette nouvelle version qui, comme son nom le laisse clairement indiquée (outre sa présentation extérieure à l’avenant), affiche clairement ses ambitions sportives, est (évidemment) destinée à surfer sur la nouvelle mode des GTI et autres mini-bombes qui connaissent alors un succès fulgurant dans les années 80. Si son moteur reste le trois cylindres à carburateur emprunté à la De Tomaso « standard », il se trouve ici épaulé par un turbo IHI qui fait porter sa puissance à 72 chevaux. Si, sur les premiers exemplaires, le turbo est assemblé sous licence en Italie, il sera, par la suite, importé directement du Japon. Extérieurement, il convient toutefois de reconnaître que cette nouvelle Turbo ne se différencie guère de sa devancière à moteur atmosphérique, à l’exception d’une nouvelle grille de calandre ainsi que des jantes noires chaussées de Michelin TRX AS (le modèle d’entrée de gamme de la famille des TRX, réputés toutefois, contrairement aux « vrais » TRX, pour ne guère apportés grand-chose par rapport aux pneumatiques « classiques »).

INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI MINI DE TOMASO

Mais aussi de dynamiser (voire de « vitaminer ») l’image de marque d’Innocenti (tant en Italie que sur les marchés étrangers), car (même si, dans son histoire, les ventes du constructeur de Lambrate n’ont jamais atteint le niveau de celles de leurs concurrentes de chez Fiat) celle-ci se trouve alors, même sur le marché italien, en perte de vitesse. Les chiffres de production parlent d’eux-mêmes : de 40 000 voitures produites à la fin des années 70, la production n’atteint plus guère que 15 000 exemplaires au milieu des années 80. En ce qui concerne ceux des ventes en France, là aussi, la dégringolade est significative : à peine entre 1 200 et 1 300 unités parvenant à y trouver acquéreurs. Avec cette nouvelle « mini-bombe », Alejandro De Tomaso espère bien redonner un nouveau souffle à la carrière des Mini Innocenti.

Lesquelles, il est vrai, ont maintenant dépassées les dix ans d’âge. En Italie comme ailleurs, certaines voitures populaires atteignent connaissent parfois des carrières fort longues et atteignent ainsi un âge « vénérable » lorsqu’elles sont finalement mises à la retraite (il n’y a qu’à observer le cas de la Fiat 126, pour rester dans les citadines italiennes, qui affichera pas moins de 28 années de service au compteur lorsqu’elle quittera la scène, à l’aube du 21ème siècle). Indépendamment de cela, il faut cependant reconnaître que (sans même revenir sur la comparaison avec Fiat), en Italie ainsi que dans les autres pays européens, face à ces derniers, Innocenti a souvent fait figure de « Petit Poucet » sur le marché des citadines. N’ayant jamais pu disposer de moyens de production ainsi que d’un réseau de vente aussi importants que ceux de ses principaux concurrents, elle ne pouvait, dès lors, pas véritablement espérer arriver à se hisser en tête du peloton.

Chez nous, à la fin de l’année 85, France Motors tente d’élargir sa clientèle en étendant la gamme vers le bas avec une nouvelle version baptisée « 650 ». Comme pour toutes les autres Innocenti Mini proposées au catalogue depuis l’année-modèle 1982, celle-ci sera équipée d’un moteur d’origine Daihatsu, même s’il ne s’agit toutefois plus d’un 3 cylindres mais d’un bicylindre, celui de la Cuore, délivrant 31 ch. Bien qu’affichant une présentation intérieure et extérieure ainsi qu’une présentation beaucoup plus « basique » que celle des autres Mini (version de base oblige), cela ne l’empêchera toutefois de bénéficier, comme ces dernières, d’une boîte à cinq vitesses.

Malgré le caractère bien trempé ainsi que son look assez « tapageur », ni la DeTomaso Turbo ni les autres versions nouvelles versions présentées au cours des dernières années ne parviennent à enrayer la chute des ventes, laquelle se poursuit, quasi inexorablement, avec moins de 12 700 Mini produites au terme de l’année 1986.

Le projet d’une nouvelle carrosserie à cinq portes, développé par le bureau d’études, n’ayant pas réussi à aboutir au stade de la série, faute de moyens suffisants allloués par De Tomaso à la firme de Lambrate, celle-ci se voit, dès lors, contrainte de recourir à des expédients. La Mini « 990 », présentée au Salon de Turin en 1986, bénéficie ainsi d’un empattement allongé de 16 cm, d’une nouvelle face avant (avec calandre, phares, clignotants ainsi qu’un pare-choc redessiné, tout comme celui monté à l’arrière) qui augmente, lui aussi, la longueur totale de 5 cm supplémentaire ; un pavillon de toit entièrement plat (légèrement bombé précédemment). La 990 se distinguant également des autres Mini par ses portières allongées, dépourvues de déflecteurs, une planche de bord décorée d’un bandeau en (faux) bois ainsi que, sur un plan plus pratique, d’une banquette à dossier inclinable. (Les versions précédentes pâtissant jusqu’ici, en effet, d’une banquette arrière dont le dossier demeurait fixe, ce qui avait fini par représenter un inconvénient de taille, alors que toutes ses concurrentes bénéficiaient déjà, souvent depuis longtemps, de cet équipement).

INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI MINI 90

Si l’année 1987 verra, en France, les ventes connaîtront un ultime sursaut, avec un peu plus de 1 700 exemplaires, la cause semble cependant être entendue pour l’Innocenti Mini, chez nous comme d’ailleurs dans son pays natal. Sur le marché hexagonal, la chute sera d’ailleurs fort brutale : à peine plus de 350 voitures, en tout et pour tout, réussiront à y trouver preneurs l’année suivante. La plupart des autres versions de la gamme adoptent, pour le millésime 89, la face avant ainsi que les pare-chocs de la 990, ainsi qu’une mécanique optimisée. En entrée de gamme, la version 650 cède la place, au début de cette année, à une nouvelle 500 recevant (d’où son appellation) une motorisation de 548 cc mais équipée, à présent, de trois cylindres.

INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI SMALL 500 LS

Comme on peut s’en douter, tous ses changements et évolutions diverses n’auront aucun effet bénéfique sur les ventes (pas plus en Italie que de l’autre côté des Alpes). Les Mini et la marque Innocenti se retiront finalement du marché français au début de l’été 1991. La place de celle-ci en France étant devenue, sur sa toute fin, des plus confidentielles, pour ne pas dire, quasiment, inexistante : durant les six derniers mois de sa présence sur le sol français, il n’y a que cinq ultimes exemplaires qui réussiront à trouver de courageux acheteurs. Entre-temps, à l’automne 90, sur le marché transalpin, la version de base voit sa cylindrée portée à 659 cc (même si elle conserve cependant la dénomination « 500 ») et la 900 reçoit la nouvelle appellation « Small ».

Alors qu’elle se voulait, à son lancement, en 1974, le symbole, à la fois, de « l’émancipation » face à sa (peut-être trop) célèbre cousine anglaise et de la volonté de son constructeur de n’être plus un simple « sous-traitant » pour la production de cette dernière au pays de Dante, l’Innocenti Mini connaîtra, malheureusement pour elle, une fin de carrière crépusculaire et sans gloire. Il est vrai qu’au même moment, son propriétaire, Alejandro De Tomaso, amorce, lui aussi, lentement mais sûrement, son déclin. Pour l’industriel italo-argentin, « l’âge d’or » que ce dernier avait connu dans les années 70 et 80 semble bel et bien terminé. Une politique d’investissement hasardeuse, une croissance trop rapide l’ayant conduit à l’endettement ainsi, « accessoirement », que certains modèles à la réputation sulfureuse en matière de fiabilité qui entâcheront (les propriétaires des premières Maserati Biturbo en garderont des souvenirs parfois fort « cuisants », au sens propre comme au figuré) conduisant finalement celui-ci en bout de course.

Au début des années 90, De Tomaso se verra contraint de se séparer de la quasi totalité des marques qui composait son empire industriel. En 1993, il doit ainsi se résoudre à revendre Maserati à Fiat comme il avait déjà dû le faire avec Innocenti quatre ans auparavant. Physiquement aussi, Alejandro De Tomaso est, sur bien des points, au bout du rouleau, un accident vasculaire cérébrale, survenu cette même année 1993, le laissant en partie paralysé et fort diminué jusqu’à sa mort, dix ans plus tard, en 2003. La marque qu’il avait fondée et qui portait son nom ne lui survivra malheureusement pas et disparaîtra à son tour l’année suivante.

Si un nouvel âge d’or commencera bientôt pour la marque au trident, désormais associé à Ferrari au sein du groupe Fiat, qui lui a permis de retrouver aujourd’hui tout son prestige, il n’en sera, hélas, pas de même avec Innocenti. Il semble que les dirigeants de Fiat ne sachent pas (et n’aient jamais vraiment su) quoi faire d’Innocenti. La marque avait déjà enterré, sans beaucoup d’états d’âme, la firme Autobianchi après la fin de la production de l’A112 (même si le nom survivra brièvement sur une nouvelle citadine qui deviendra, par la suite, la Lancia Y10). Sans doute, à la fois parce que le paysage et le contexte automobiles des années 1980 et 90, en Italie comme dans le reste de l’Europe, n’était plus celui des années 1950 et 60 et aussi parce que, dans le cas de ces deux marques, celles-ci risquaient fort de devenir des rivales de ses propres modèles et donc de poser, rapidement, un problème de concurrence en interne.

Lorsque la marque atterrit dans l’escarcelle de Fiat, au début du printemps 1993, l’usine de Lambrate est alors fermée et sera ensuite démolie pour laisser la place à un nouveau quartier résidentiel. La Small 5000 SE, résultant d’un assemblage entre la carrosserie de la 990 et la mécanique de la 500, sera toutefois assemblée au sein des usines Fiat à Turin avec les stocks de pièces restantes qui seront en vente jusqu’à la fin de l’année 93. L’Innocenti Mini « Bertone » appartenant alors définitivement au passé, après une carrière longue de près de vingt ans et environ 350 000 exemplaires (toutes versions confondues, la part de celles à moteurs japonais étant de quelques 115 000 voitures, celles vendues en France (versions à moteurs Austin et Daihatsu) étant estimé à 30 000 unités.

INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI KORAL
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INNOCENTI ELBA
INNOCENTI MINI « BERTONE » - Sauces Worcestershire et bolognaise.
INNOCENTI MILLE

Si Innocenti ne disparaît pas avec la fin de la production des Mini Bertone, pour l’ancien constructeur des Mini italiennes, ce ne sera toutefois qu’un sursis. Un sursis qui sera toutefois fort court et peu glorieux, les derniers modèles à porter le nom d’Innocenti n’étant que des Yugo rebadgées sous le nom de Koral et ensuite des Uno produites par la filiale brésilienne (vendues sous les noms d’Elba et Mille). Comme (a posteriori) il était sans doute prévisible dès le départ, la sauce ne prendra pas vraiment et la commercialisation des « Uno Innocenti » prendra fin à l’automne 1997, signant ainsi la fin définitive de la marque Innocenti.

Maxime DUBREUIL

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